MANSA MOUSSA
Son rayonnement va dépasser le cadre du continent, grâce à l'empereur Mansa Moussa qui monta sur le trône dès 1303, dans des conditions inattendues. Cette année-là, l'empereur aventurier Aboubakri II (neveu de Soundiata), embarquait des milliers de guerriers, des vivres et un important magot pour aller s'échouer sur les côtes de ce qui allait devenir l'Amérique, près de deux siècles avant Christophe Colomb. Comme on ne revit jamais le conquérant téméraire, Mansa Moussa fut intronisé à la tête de l’empire du Mali. Ce monarque intelligent et raffiné fera connaître l’un des plus illustres empires africains à l'extérieur, d'abord par le pèlerinage qu'il accomplit à La Mecque en 704 de l'hégire (1324), en compagnie de 60 000 porteurs, 10 000 sujets et 500 serviteurs. Mansa Moussa transportait, sur une quarantaine de mules, plus de deux tonnes d'or sous forme de canne ou de poudre, qu'il distribua aux officiers, fonctionnaires et nobles de la cour du sultan d’Egypte. On devait frôler l’incident diplomatique lorsque le monarque malien, reçu par le tout puissant sultan, refusa de se prosterner. En fait, Mansa Moussa n'a jamais désiré rencontrer le monarque égyptien. C'est sur l'insistance de ce dernier que l'empereur malien accepta cette visite. Les choses devaient néanmoins rentrer dans l'ordre devant la grandeur, la grâce et la générosité de l'empereur noir et musulman pieux. Le souverain malien regagnera son pays en compagnie de nombreux savants, des juristes et de l’architecte de Grenade, Abou Issac. Mansa Moussa ramènera un nombre important de livres à Tombouctou où il fera construire une grande bibliothèque. Il installera également dans cette métropole africaine, tous les lettrés qui l’ont accompagné, enrichissant ainsi la capitale intellectuelle et religieuse du continent. Le charisme de Mansa Moussa a impressionné tous les voyageurs étrangers qui l'ont approché. En 1339, dans sa Carte du monde<:i>, Angelo Dulcert tracera la route qui mène chez le «Rex Melli» (le roi des mines d'or). Elle passe par l'Atlas et le Sahara pour aboutir à l’empire du Mali. Ainsi, dans tout le monde arabo-espagnol et méditerranéen, intellectuels, navigateurs et commerçants savaient tout sur l’empire du Mali, la grâce de son souverain et ses richesses. Le chroniqueur arabe, Ibn Batouta, rapporte dans ses récits de voyage :
« La sûreté est complète et générale dans tout l’empire du Mali. Le sultan ne pardonne point à quiconque se rend coupable d’injustice... Le voyageur pas plus que l’homme sédentaire n’a à craindre les brigands, les voleurs, ni les ravisseurs. Les Noirs ne confisquent pas les biens des hommes blancs qui viennent à mourir dans leurs contrées, quand même il s’agirait de trésors immenses. Ils les déposent au contraire chez un homme de confiance d’entre les Blancs, jusqu’à ce que les ayants-droit se présentent et en prennent possession. »
Egalement dans les ouvrages de cette moitié du XIVème siècle, on pouvait lire : «Il y a au monde quatre sultans, non compris le sultan suprême (empereur de Constantinople), à savoir le sultan de Bagdad, le sultan du Caire, le sultan du Bornou (autre royaume africain) et le sultan du Mali.» Quant à l'Atlas du monde du roi de France Charles V, dressé par le Catalan Abraham Cresques en 1375, il présentait le Rex Melli tenant un morceau d'or. Mais après la mort de Mansa Moussa, l’empire du Mali commença une lente décadence due aux assauts guerriers des royaumes peuls, animistes et des Askias. Les successeurs de Mansa Moussa - Maghan, Mansa Souleyman et Moussa II -, ne réussiront pas à perpétuer son oeuvre. Après le déclin de l’empire du Mali, le conquérant Sonni Ali (1464 - 1492), édifia sur ses ruines, le Songhaï (ou empire de Gao).
SOUNDIATA KEITA
Cependant, dans la région les candidats à la succession d'un empire en pleine décomposition ne manquaient pas. Le souverain tout puissant du royaume soninké du Sosso, Soumangourou Kanté, finira plus tard de détruire Koumbi Saleh et ce qui restait du grand empire du Ghana, affirmant par-là sa volonté de prendre la relève. Après la défaite de ses armées, le Ghana devait sombrer dans une anarchie indescriptible. Des bandits de grands chemins pratiquaient le rapt d'esclaves qu'ils revendaient ensuite aux maures. Pour mettre fin à ce commerce infâme qui ne correspondait pas vraiment aux habitudes traditionnelles de la plupart des royaumes africains, Soumangourou Kanté proposa une alliance aux souverains mandings. Ces derniers qui l'ont toujours méprisé du fait de son appartenance à la caste inférieure des forgerons, déclinèrent l'offre.
Ce contentieux allait peser lourd par la suite car, vexé, Soumangourou Kanté, au lieu d'abolir cette forme d'esclavage, la reprendra à son compte. A la tête dune des plus puissantes armées de l’époque, il sèmera la terreur dans la région pendant plusieurs années. Cette situation inquiétait les populations du pays manding. Dans cette région, de petites principautés ont longtemps évolué dans une relative coexistence pacifique. Des clans familiaux ou tribaux y ont administré des organisations économiques, sociales, politiques et culturelles d'une grande cohésion. Devant la menace expansionniste des royaumes voisins, la première entreprise de réunification pour faire face, fut l’œuvre des Keïta, originaires de Narena dont la principauté se situait entre Siguiri et Kita. Ce premier royaume qui fut une sorte de confédération, sera tout d'abord dirigé par Hamana en 1150, ensuite par Djigui Bilali en 1175 qui cédera le trône, en 1200 à Moussa Keïta. Le fils de ce dernier, Naré Famaghan, sera leur premier conquérant en s'emparant de quelques territoires au Sud et de toute la rive droite du haut Niger. Naré Famaghan est le père du plus illustre des souverains manding, Soundiata Keïta.
La légende raconte que le petit Soundiata était infirme et se traînait à quatre pattes jusqu'à l'âge de sept ans. Après avoir conquis le pays manding, le roi du Sosso Soumangourou Kanté, fit exécuter tous les princes des ethnies locales. C'est miraculeusement que le jeune Soundiata échappa à ce châtiment. Plusieurs fois exilé à Ségou et en pays voltaïque - actuel Burkina Faso -, loin des intrigues de palais et des exactions des troupes occupantes Sossos, il attendit son heure. Excédé par l'asservissement et le déshonneur de son peuple, le Conseil des anciens décida de faire appel au prince manding pour libérer le pays. Soundiata Keïta n'eut aucun mal à lever une armée auprès de populations d'ethnies différentes mais toutes hostiles au pouvoir du roi de Sosso. A la tête de cette armée hétéroclite, le prince manding devait attaquer en 1234, les unités avancées de l'armée de Sosso. La victoire des combattants Sossos plus expérimentés que les hommes de Soundiata, fit vite comprendre au jeune prince que l’heure de la défaite n’avait pas encore sonné pour Soumangourou Kanté et sa puissante machine de guerre. Une certaine légende disait du chef Sosso, qu'il était invulnérable car aucune flèche n'avait su l'atteindre sur le champ de bataille grâce à son immense talent de magicien. Aussi, chez les Keïta on emploiera la ruse en offrant la propre sœur du prince manding à Soumangourou Kanté, en signe d'allégeance. Fidèle à sa réputation de grand amateur de femmes, le souverain Sosso succomba au charme de la jeune et belle Méniamba Souko, qui réussit à lui soutirer le secret de son invulnérabilité. Seul un ergot de coq blanc pouvait le tuer. Légende ou réalité magique africaine, toujours est-il que la bataille de Kirina qui devait s'engager peu de temps après, fut fatale à Soumangourou Kanté. De part et d'autre, d'importantes forces allaient s'affronter à coup de flèches empoisonnées et de lances, dans une sanglante bataille de fantassins. L'armée de Soundiata qui était composée de chasseurs armés de lances, de boucliers et de redoutables archers, allait prendre le dessus. La victoire des armées mandings permit à Soundiata Keïta de se débarrasser du roi du SossoSosso dont on ne retrouva jamais le corps. Soundiata avait vaincu et soumis ses troupes. Le prince manding avait également annexé son royaume en même temps que ses dépendances qui s'étendaient du Baghana à la cité de Koumbi Saleh, ancienne capitale du Ghana.
LES GRANDS EMPIRES OUEST-AFRICAINS AU XIIIè et XIV ème siècle
Ghana prédécesseur du MALI
Soundiata sera proclamé Mansa unique (souverain suprême), du pays manding par tous les nobles des quarante principautés qui seront ainsi fédérées. Ce nouvel empire prendra le nom de Mali. Après la chute du Sosso, Soundiata Keïta étendra sa domination sur une partie du Sénégal et les principales sources aurifères de la région.
Le nouveau souverain malien n’abolira pas l'esclavage domestique mais, tout commerce de captifs maliens avec les Maures ou les Arabes, serait puni de mort. Soundiata organisera l’empire du Mali d'une manière décentralisée. Près de 400 villes étaient réparties en une vingtaine de provinces subdivisées en cantons. Toutes ces entités administratives étaient gérées par des autorités religieuses ou politiques qui étaient responsables devant le souverain. Dans cet empire qui connaissait déjà l’industrie de la métallurgie et du fer, comme la plupart des autres Etats africains, Soundiata introduira la culture du coton, de l’arachide, des papayes et le développement de l’élevage. L’empire du Mali au moment de son apogée - XIVème siècle -, s'étendra de la région nord de la Guinée à Tombouctou, et des côtes atlantiques du Sénégal et de la Gambie à Gao sur le fleuve Niger. Les principales ressources de l’empire, provenaient de l'or, des impôts frappant le bétail, des récoltes, de taxes douanières et de butins de guerre.
Comme le Ghana, l’empire du Mali évoluait dans un environnement de grande tolérance religieuse et culturelle. Plusieurs ethnies qui se sont longtemps fait la guerre ailleurs, ont vécu au Mali en parfaite harmonie. Les intellectuels et marchands venus du monde arabe ou des autres royaumes négro-africains, séjournaient et commerçaient en toute sécurité avec les Maliens. Comme l’Egypte, la Nubie, le royaume d’Ethiopie ou l’empire du Ghana, le Mali sera l’un des premiers Etats africains véritablement connus avec précision.
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